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Le combat (solitaire ?) de Josette Londé, Présidente de l’UNEPS

15/12/2014

Alors que la date-butoir fixée par le Conseil Constitutionnel arrive prochainement avec la fin 2014, le Guide s’est entretenu avec Josette Londé, Présidente de l’Union Nationale des Entreprises de Portage Spécialisées (UNEPS), Vice-Présidente de la FEPS (Fédération Européenne du Portage Salarial), et fondatrice du Cabinet JL Conseil

Josette Londé, vous êtes la présidente de l’UNEPS. Pouvez-vous nous présenter sa démarche et sa singularité au sein du marché du portage français ?

D’abord un rappel l’historique. J’étais présidente de la FNEPS (Fédération Nationale des Entreprises de Portage) en 2005.

 

Je portais une vision diamétralement opposée à celle du SNEPS (un ancien syndicat) qui se positionnait surtout en faveur des grosses entreprises et souhaitait s’aligner sur l’intérim. (Ndlr : ces deux syndicats ont depuis fusionné dans un syndicat unique, le PEPS).

 

Pour moi, le portage salarial s’adresse à des gens complètement autonomes et indépendants. Le rôle d’une société de portage c’est surtout d’apporter une simplification administrative, c’est comme si quelqu’un allait voir son comptable.

 

Je plaide pour qu’on reconnaisse la réalité du terrain, la pratique et non pas un portage qui octroie le statut de salarié de plein droit et donc donne accès au chômage. Il faut une analyse strictement juridique pas une analyse de confort pour les portés, qui en tant que vrais indépendants ne devraient pas bénéficier du chômage C’est une question d’honnêteté intellectuelle et juridique.

 

Les grosses entreprises de portage se sont rapprochées des syndicats des salariés pour qu’ils les assurent de ce salariat. Il y a de grosses sommes en jeu, je préfère éviter la langue de bois. C’est pourquoi quand j’ai dénoncé cette hypocrisie, j’ai démissionné de mon poste de la FNEPS.

 

A l’époque nous étions sous le coup d’un risque pénal pour le prêt de main d’œuvre, c’est d’ailleurs pour cela que les membres de la FNEPS ont cherché à se rapprocher du SNEPS puis ont fusionné ;

 

L’UNEPS a été créée pour éviter cette politique de l’autruche juridique et pour correspondre à la réalité du métier.

 

 

Qui sont aujourd’hui les membres de l’UNEPS ?

 

Une quinzaine de sociétés qui offrent des solutions de portage à tous et notamment à des prestataires dans des activités manuelles.

 

Le PEPS a adopté une position pour se garder le monopole du portage et voulait se fixer sur les prestations intellectuelles pour concurrencer l’intérim dans ce secteur.

 

Pourtant, le portage salarial s’adresse à n’importe qui, c’est surtout une façon de simplifier les travailleurs indépendants, comme un service, un statut comme un autre.

 

Vouloir phagocyter le portage uniquement pour des prestations intellectuelles, juridiquement c’est se baser sur un imbroglio.

 

Pour mettre à mal cette situation, mon action a été directe, j’ai écrit à Nicolas Sarkozy tous les mois pour lui expliquer qu’il fallait légaliser cette nouvelle forme d’emploi qui permettait à de nombreuses personnes de retrouver une activité. J’ai été entendue par Nicolas Sarkozy puisque le portage a été légalisé en juin 2008.

 

 

Quelles sont les actions que vous envisagez désormais dans le cadre de votre mandat ?

 

Je n’ai même pas à imposer une conception puisque le Conseil Constitutionnel a tranché en ma faveur en 2014 en invalidant le texte sur le portage.

 

C’était une hérésie juridique. C’est pourquoi à, ma demande, dès 2010, il y a eu une enquête sur le fait que le PRISME (syndicat d’intérim) ait signé l’accord qui encadre le portage. C’est comme si on demandait aux bouchers de signer pour les boulangers. Nicolas Sarkozy a donc demandé au Ministère du Travail de diligenter une commission d’enquête qui a rendu un avis négatif sur l’accord de juin 2010. C’est pour cela que l’accord n’a pas été étendu avant 2013.

 

Quand il y a eu la nomination du nouveau gouvernement, l’intérim et les syndicats d’employés avaient intérêt à tuer le portage salarial. Ils sont donc allés taper à la porte du Gouvernement pour étendre l’accord de juin 2010 qui jusqu’à présent ne s’appliquait à personne…puisque seule l’organisation représentant l’intérim l’avait signé.

 

Depuis, l’arrêté d’extension de Michel Sapin en 2013, le cadre sur le portage salarial s’appliquait à tout le monde. J’ai donc écrit à François Hollande pour lui demander que le portage salarial soit traité comme une activité indépendante.

 

Nous n’avons rien à voir avec des salariés et avec le conseil des prud’hommes, nous avons à voir avec le droit des affaires et les tribunaux civils. La personne qui se met à son compte peut choisir un statut entrepreneurial comme le portage salarial, l’autoentrepreneur, ou l’EURL.

 

La réalité c’est que toutes les grosses sociétés de portage voulaient bénéficier de la loi Fillon qui leur permet pour toutes les rémunérations de moins de 1,5 SMIC de bénéficier d’exonération de charges.

 

Tout ça c’est une question de gros sous, si la législation tombe, ils devront rembourser.

 

Le gouvernement ayant été ridiculisé par le Conseil Constitutionnel, ils ont donc accéléré la procédure juridique par le biais d’une ordonnance à valeur législative. Il y a de fortes chances que cette ordonnance reprenne le sens de l’accord de 2010.

 

Pour moi, il y a clairement un risque pour cette ordonnance d’être à nouveau attaquée par FO, c’est comme si on disait à un boulanger qu’il devait faire un rémunération minimum, c’est comme si on lui imposait un chiffre d’affaires.

 

Je pense à tous ces gens qui sans le portage ne pourraient se mettre à leur compte sans le portage, qui ne gagnent pas. J’avais des demandes de la part de petites gens car l’auto-entrepreneur étant limité, il fallait un statut pour combler le trou.