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Le Conseil d’État suspend la réforme de l’assurance chômage
02/09/2021
Décidée à l’été 2019, la mise en place de la réforme de l’assurance chômage a été suspendue et reportée à plusieurs reprises, notamment en raison de la crise sanitaire. Jusqu’à la décision du Conseil d’État du 22 juin 2021, la réforme devait officiellement entrer en vigueur le 1er juillet 2021.
Mais face aux contestations syndicales et à une situation économique encore fragile, la plus haute juridiction administrative française a décidé de suspendre certaines mesures phares du texte.
Des syndicats mobilisés contre une réforme jugée injuste
Plusieurs organisations syndicales — CFDT, CGT, FO, CFE-CGC, UNSA, FSU, entre autres — ont vivement contesté différentes dispositions de la réforme, notamment :
Le nouveau mode de calcul de l’allocation chômage, fondé sur le salaire journalier de référence (SJR), qui pénaliserait particulièrement les personnes ayant un parcours professionnel discontinu ;
Le principe de dégressivité des allocations chômage au-delà d’un certain seuil de revenu (6 430 € brut mensuel), considéré comme injuste pour les cadres ou salariés en fin de carrière ;
Une réforme jugée inadaptée au contexte post-crise, aggravant les inégalités pour les demandeurs d’emploi déjà fragilisés.
Les syndicats ont aussi pointé l’effet potentiellement dissuasif de certaines mesures sur le retour à l’emploi, surtout dans les secteurs connaissant une forte précarité ou une alternance fréquente entre périodes d’emploi et de chômage.
La décision du Conseil d’État : une suspension motivée par la conjoncture
Dans son ordonnance, le Conseil d’État valide sur le fond plusieurs aspects de la réforme. Il considère par exemple que la dégressivité des allocations n’est pas manifestement disproportionnée, au regard des différences de situation entre les bénéficiaires.
En revanche, sur le calendrier d’application, la juridiction émet des réserves. Elle estime que les conditions du marché du travail ne sont pas réunies pour justifier l’entrée en vigueur immédiate de certaines mesures. La décision souligne que la mise en œuvre au 1er juillet des dispositions impactant fortement les personnes ayant des carrières hachées ou précaires constitue une erreur manifeste d’appréciation.
En conséquence, plusieurs mesures sont provisoirement suspendues, notamment :
Le nouveau calcul du salaire journalier de référence ;
La durée d’indemnisation et les différés d’indemnisation ;
Les nouvelles règles de coordination des régimes.
Le bonus-malus reporté, mais pas abandonné
Autre mesure emblématique, le bonus-malus appliqué aux entreprises recourant massivement aux contrats courts, voit lui aussi son application reportée. Initialement prévu pour 2021, il ne sera mis en œuvre qu’à partir de septembre 2022, afin de laisser le temps aux entreprises de s’adapter.
Et maintenant ? Une réforme toujours en suspens… mais pas annulée
La décision du Conseil d’État ne constitue pas une annulation de la réforme. Il s’agit d’une mesure d’urgence, destinée à suspendre temporairement l’application de certaines dispositions. Les recours sur le fond de la réforme seront examinés dans les mois à venir.
Ainsi, le gouvernement pourrait revenir avec une réforme modifiée, ou choisir de repousser une nouvelle fois son entrée en vigueur, en fonction de l’évolution du marché du travail et du contexte économique global.