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Coronavirus : qu’en est-il du chômage partiel en portage salarial ?

03/04/2020

Pour soutenir l’économie face à la crise sanitaire liée au coronavirus (COVID-19), l’État débloque des fonds importants pour que les entreprises puissent massivement utiliser le chômage partiel et ainsi éviter les licenciements économiques. Si le secteur du portage salarial est également concerné, quelques questions peuvent se poser quant à la mise en œuvre concrète du dispositif. Voici donc quelques éclaircissements.

Le Sénat a voté le 20 mars, à l’unanimité, la loi de
finance rectificative prévoyant une ligne budgétaire supplémentaire de 5,5
milliards d’euros pour la mise en place de l’activité partielle. Ce dispositif,
appelé plus couramment chômage partiel, ou chômage technique, s’applique à tous
les secteurs d’activité, y compris celui du portage salarial.

Rapide retour sur le fonctionnement du « chômage
partiel » modifié en 2013 et ses nouvelles modalités de déclenchement pendant
cette crise, avant de se pencher sur les questions qui peuvent se poser quant à
sa mise en œuvre concrète en portage salarial.

Chômage partiel, les grands principes de fonctionnement

Le but ici n’est pas d’être
exhaustif, mais seulement de présenter les grands principes pour faciliter la
compréhension du dispositif.

Le chômage partiel est une
mesure qui permet à une entreprise de diminuer le temps de travail de ses
salariés, sans modifier leur contrat de travail, afin de préserver leurs
emplois dans l’entreprise en période de crise.

 

La perte
de revenu subit par un salarié du fait de la diminution de son temps de travail
est en partie compensée par l’employeur, l’Etat, et l’Unédic. Cette précision est
d’autant plus importante que ce salarié ne peut refuser de se voir appliquer
ce chômage technique
.

La diminution du temps de travail dans
l’entreprise peut se présenter sous deux formes :

  • soit la fermeture temporaire d’un établissement
    (un ou plusieurs jours par semaine) ou partie d’établissement ;
  • soit la réduction du nombre d’heures à
    effectuer dans la semaine en deçà de la durée légale de travail.

Enfin, le salarié placé en activité partielle reçoit une indemnité
horaire, versée par son employeur, correspondant à 70 % de sa rémunération
brute. Les actions de formation mises en œuvre pendant les heures chômées de
l’activité partielle sont quant à elles normalement indemnisées à hauteur de 100
% de la rémunération nette antérieure du salarié, mais attention,
l’ordonnance du 27 mars est venue préciser que ce ne serait pas le cas pour la
mise en place de l’activité partielle liée au Covid-19 (les heures passées en
formation seront donc indemnisées à hauteur de 70 % de la rémunération brute).

NB : pendant les heures
non travaillées par le salarié, son contrat de travail est suspendu, il ne peut
donc pas bénéficier de l’allocation chômage traditionnelle.

 

Chômage partiel et coronavirus : des conditions de mise en œuvre adaptées à la crise sanitaire

Une précision liminaire importante : l’Etat et
l’Unédic prendront en charge financièrement une très grande partie du coût de
mise en œuvre du dispositif pendant cette période de crise COVID-19 !

Le coût résiduel pour l’entreprise qui fait
appel au chômage partiel est ainsi réduit au minimum.

Ensuite, pour faire face à la situation que nous traversons,
le gouvernement a prévu dans le décret du 25 mars et l’ordonnance du 27 mars 2020 d’assouplir à la fois les conditions et modalités de
recours au chômage partiel, d’augmenter les montants alloués aux entreprises
qui mettent en place ce dispositif, et d’élargir les publics pouvant bénéficier
du dispositif.

Des conditions d’accès assouplies

Tout d’abord, l’employeur dispose d’un délai de trente jours
à compter du placement de ses salariés en activité partielle en « cas de
circonstance de caractère exceptionnel » (le Covid-19 entrant dans cette
catégorie) pour adresser sa demande de mise en place du dispositif à
l’administration.

Ensuite, afin d’accélérer la procédure, l’avis du CSE n’est plus
obligatoirement donné au moment de la demande de chômage partiel, la date de la
consultation suffisant. L’envoi de l’avis de l’instance peut se faire dans un
délai de deux mois.

Dans le même esprit de rapidité et d’efficacité, le délai
de réponse de l’administration est abaissé à 48h
, au lieu de 15 jours
traditionnellement.

Pour faire face à cette crise dans le temps, le gouvernement
a également prévu que la durée maximum de l’autorisation de l’administration
de chômage partiel passe de 6 à 12 mois
.

Enfin, les salariés en forfait jours peuvent désormais
bénéficier du dispositif
, ce qui n’était pas le cas auparavant, sauf
exception.

Les jours et demi-journées seront convertis en heures pour
simplifier les calculs. Les modalités de conversion seront définies dans un
décret qui devrait paraître dans les prochains jours. L’ordonnance du 27 mars
prévoit également de fixer par décret les modalités de calcul des indemnités et
allocations de chômage partiel pour les salariés qui ne sont pas soumis aux
dispositions légales ou conventionnelles relatives à la durée du travail.

Revalorisation
du montant de l’allocation versée par l’Etat à l’entreprise

Prenons un exemple simple d’une situation de chômage
partiel, avant et après la mise en place des mesures exceptionnelles.

Pour faciliter notre exemple, le salarié travaillera 35h
par semaine.

Son employeur décide pour faire face à la crise, de
maintenir l’activité de son salarié 20 heures par semaine, et de le passer en
chômage partiel le reste du temps, soit 15 heures par semaine.

Le salarié sera donc payé 20h normalement (100% de son
salaire), et 15h à 70% de sa rémunération brute (soit environ 84% de son
salaire net).

Ce qui change avec les nouvelles mesures, c’est
la garantie de remboursement, et son montant, de l’employeur par l’Etat.

Avec le dispositif classique, l’État rembourserait les 15
heures à l’entreprise sur la base d’un forfait horaire (7,74 euros pour
les entreprises de moins de 250 salariés, ou 7,23 euros pour les autres). Dans
ce cas, le reste à charge pour l’entreprise est potentiellement important,
notamment si ses salariés ont des rémunérations largement supérieures au SMIC,
comme cela peut être le cas en portage salarial.

Le dispositif prévu dans le décret du 25 mars garantit à
l’employeur un remboursement de l’Etat proportionnel à la rémunération de son salarié :
le montant de l’allocation jusqu’ici forfaitaire passe ainsi à 70% de la rémunération
du salarié, dans la limite de 70% de 4,5 fois le SMIC horaire.

L’objectif annoncé du gouvernement est qu’il n’y ait pas, ou
peu, de reste à charge pour les entreprises qui décident de mettre en place ce
dispositif afin notamment de maintenir dans l’emploi leurs salariés.

Le
chômage partiel est-il applicable au portage salarial ?


Le Guide du portage vous propose quelques recommandations qui n’ont pas de valeur juridique. Elles sont issues de l’étude des textes en vigueur et d’échanges avec des acteurs du secteur. Nous mettrons à jour régulièrement ces informations grâce au retour pratique d’entreprises de portage qui mettent en place le dispositif de chômage partiel et aux nouveaux textes qui sortiront dans les prochains jours.

Les entreprises de portage salarial peuvent légalement mettre
en place le dispositif du chômage partiel.

Quelques questions concrètes restent néanmoins en suspens, au
vu des spécificités de l’activité. Le fait qu’aucune disposition légale particulière
ne semble avoir été prise pour le portage salarial à ce jour invite à la
prudence.

L’enjeu est d’autant plus important que le gouvernement a
rappelé le 30 mars les sanctions encourues par les entreprises qui feront de
fausses déclarations pour bénéficier du dispositif, à savoir le remboursement
des sommes perçues, l’interdiction de bénéficier du dispositif pendant 5 ans,
ainsi que deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende.

Ainsi, au-delà des questions de reste à charge pour les
entreprises de portage salarial (EPS), et de trésorerie que cela peut poser, la
question de l’éligibilité des salariés portés à l’activité partielle
, pour
le motif exceptionnel lié au Covid-19, doit être étudié minutieusement, au cas
par cas.

Une EPS peut demander à bénéficier du dispositif en cas de baisse
d’activité liée à la conjoncture actuelle.
Pour attester de cette baisse
d’activité, on peut penser qu’un ou plusieurs de leurs salariés
portés devront avoir connu une suspension, un arrêt ou un non-renouvellement de
leurs contrats en cours liés à la crise sanitaire
. En effet, dans le cas
précis du portage salarial, le fait que les salariés portés ne puissent pas
réaliser leur mission à cause du Covid-19 entraîne de facto la baisse de
l’activité de l’EPS, et donc justifie le recours à l’activité partielle.

La question de l’éligibilité des salariés portés apparaît dès
lors fondamentale, et le lien entre l’arrêt ou la baisse d’activité du salarié
porté doit selon nous être rattaché à la situation exceptionnelle que nous
traversons.

Une attestation des entreprises clientes des salariés portés
justifiant de l’arrêt des missions pour cause de Covid-19 semble donc
importante, notamment en cas de contrôle.

Concrètement, un salarié porté qui n’avait pas de mission
avant la crise sanitaire ne devrait pas pouvoir bénéficier de la mise en place
de l’activité partielle pour ce motif
.

Pour les mois qui vont suivre, on peut utiliser le même
raisonnement : le fait de ne pas avoir d’activité doit directement être
lié à la perte de contrat et de missions qui étaient préalablement prévues
,
et que la crise a rendu impossible. Là encore, une attestation peut sembler
utile de la part des entreprises clientes qui ont suspendu les missions en
question.

Nous restons bien évidemment dans l’attente de précisions
demandées par les organisations professionnelles du secteur au gouvernement.
Nous ne manquerons pas de vous tenir informés de l’évolution des dispositifs
mis en œuvre.

Si vous avez des questions à ce sujet, n’hésitez pas à nous
contacter via l’onglet
contact
du site.

Bon courage à toutes et à tous.