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Interview de François Jenny, Président du PEPS et dirigeant d’ALTROS

02/03/2022

Nous avons le plaisir aujourd’hui d’interviewer à nouveau François JENNY, cette fois de manière plus intimiste. Ce fondateur et dirigeant du groupe ALTROS, et actuel président du PEPS, est un entrepreneur passionné et visionnaire, résolument tourné vers l’humain qui depuis de nombreuses années déjà œuvre et milite pour le développement et la sécurisation de notre forme d’emploi préférée !

C’est parti pour l’interview du dirigeant des dirigeants en portage salarial !

Bonjour, avant d’échanger sur ton poste actuel de Président du PEPS, pourrais-tu nous en dire un peu plus sur toi, ton entreprise ALTROS, ton parcours, et ce qui t’a amené au portage salarial ?

Bonjour
l’équipe du Guide ! J’ai 61 ans, je suis marié et j’ai 3 enfants.

Avant de
fonder ALTROS, j’ai travaillé à l’étranger dans le domaine de l’exploration
pétrolière, j’étais un « expat ». Pour moi ce n’était pas vivable sur
le long terme, j’ai donc changé mon fusil d’épaule et me suis lancé dans la
micro-électronique, plus précisément dans la fonction support/technique et
relation clients.

J’avais
trouvé ma voie : servir les clients, être proche des gens, répondre à
leurs besoins, résoudre une situation problématique, c’est ce qui m’a toujours
plu.

A 40 ans, j’ai
eu une phase de questionnement, le fameux « premier bilan », et je me
suis dit à ce moment-là : « il faut que tu prennes ton
indépendance
 », que « tu sécurises ta propre destinée ».
Devenir indépendant, être à mon compte, et même reprendre une entreprise, c’est
ça que je voulais. La suite est une affaire de rencontre : j’ai lancé ma
première boîte de portage avec un associé, au bout de quelques mois, j’avais seul
le gouvernail en main !

Vingt ans plus
tard, nous sommes 8 salariés permanents, plusieurs centaines de salariés
portés, un nouvel actionnaire, Mare Nostrum, et la boîte se porte très
bien !

J’ai
toujours la passion des premiers jours
, les raisons qui ont fait que je me suis lancé sont toujours
là. J’adore la rencontre avec les freelances, les consultants :
j’adore découvrir de nouveaux mondes et de nouveaux horizons, apprendre
et m’enrichir au contact des autres… C’est mon plus beau cadeau !

Bien sûr,
tout n’a pas été « un long fleuve tranquille » comme on dit. Il y a
eu plusieurs années difficiles, mais au fil de l’eau j’ai développé pas mal de
compétences et ajouté plusieurs cordes à mon arc en management, gestion
d’entreprise… Même si j’ai passé des diplômes en parallèle, cela reste de la
théorie, ce que l’on apprend au quotidien n’a pas de prix.

Face à la
crise, le portage salarial a été durement impacté, pas évident on l’imagine d’être
Président dans une situation si complexe. Qu’est-ce que le PEPS et toi avaient
mis en place pour aider les entrepreneurs du portage salarial à traverser cette
période difficile ?

Je suis
impliqué dans le syndicat depuis toujours, mon travail en tant que Président
aujourd’hui est d’assurer la continuité de ce que l’on a mis en place avec les
équipes du PEPS depuis des années.

Le plus
marquant pour moi dans ce mandat, percuté par la pandémie, est l’énergie
et la solidarité dont ont fait preuve les membres du syndicat
, pendant
cette crise. La priorité de tous, c’était de répondre à toutes les
sollicitations des consultants portés qui ont parfois tout perdu du jour au
lendemain. Il fallait gérer des situations urgentes, et nous l’avons fait, tous
ensemble.

La Commission
droit du travail et bonnes pratiques qui s’occupe de la mutualisation des
questions posées par les consultants portés a réalisé un travail remarquable de
veille, de collecte d’informations et de vulgarisation.

Un autre
exemple sur le sujet de l’activité partielle, des décrets « tombés »
tous les deux jours, nous avons donc mis en place un COPIL qui a géré ce flux au
fil de l’eau pour aider les entreprises de portage salarial (EPS) à s’approprier
les textes rapidement et sans risque juridique et financier. Globalement nous
avons eu une énorme intensification du service supports aux adhérents du
PEPS, nous avions des réunions tous les jours et des publications tout aussi
quotidiennes !

Cela a été
une période d’entraide, et c’est finalement tout ce que je veux en
retenir malgré les difficultés traversées.

 

Vous avez
également décidé de lancer avec le PEPS votre propre label sur le portage
salarial des entreprises de portage, tu peux nous en dire plus ?

Bien
sûr ! Dans le cadre d’un portage salarial, le travailleur indépendant
souhaite avant tout se consacrer à son activité professionnelle et se libérer
des contraintes administratives, sociales et fiscales, qui sont,
malheureusement inévitables lorsqu’on se lance en freelance. Il doit donc
pouvoir avoir une confiance entière à l’entreprise de portage salarial, à qui
il confie cette charge. Nous avons justement progressé dans cette relation de
confiance, avec l’avenant à la convention collective de la branche, qui vient
préciser et clarifier les frais imputés aux travailleurs indépendants portés.

Dans cette
perspective, nous avons décidé d’aller encore plus loin dans la sécurité des
indépendants, en instaurant un label reconnu et certifié par un organisme
indépendant, l’AFNOR, pour valoriser les entreprises de portage salarial les
plus vertueuses. Concrètement, ce label reconnaît les entreprises de portage ayant
pris des mesures concrètes pour permettre aux travailleurs indépendants portés
et à leurs clients d’agir en toute sécurité. Pour les indépendants, le label
représente donc un critère de sélection fiable dans le choix de leur entreprise
de portage salarial.

Et
justement, qu’est-ce que le label garantit aux indépendants et aux entreprises
clientes ?

Comme je le
disais précédemment, c’est avant tout la garantie d’exercer en toute sécurité.
Nous avons une procédure de labellisation complète et détaillée au sein d’un
rapport d’audit que nous suivons rigoureusement pour évaluer les entreprises de
portage salarial candidates. Chaque audit, qui dure en général plusieurs jours,
est réalisé par l’AFNOR, en lien avec le Comité de labellisation du PEPS. Nous
évaluons alors toutes les pratiques de l’entreprise de portage salarial, que ce
soit en matière de sécurité juridique, de solidité financière et de qualité des
services délivrés auprès des indépendants et de leurs clients. L’objectif est
de nous assurer que ces pratiques sont bien conformes avec les textes en
vigueur.

Pour les
travailleurs indépendants portés, ce label de portage salarial PEPS est donc la
garantie de travailler avec un partenaire reconnu sur le marché, transparent
sur ses pratiques et respectueux de la législation. De la même façon que pour
les entreprises clientes, choisir un travailleur indépendant relevant d’une
société de portage salarial labellisée leur permet de recourir au portage avec
plus de sérénité, la qualité et la satisfaction des services étant également
évaluées.

Les
négociations de branche ont continué malgré la crise, tu pourrais nous dresser
un bilan des dernières négociations, et nous parler de celles à venir ?

Parmi les
négociations les plus marquantes, il y a eu bien sûr celle sur la
complémentaire santé et la prévoyance, trouver un accord équilibré était un
gros enjeu !

Je citerai
ensuite la formation professionnelle, nous avons fait un travail remarquable
avec les partenaires sociaux ! La formation professionnelle est un enjeu
essentiel pour les freelances, qui doivent sans cesse s’adapter aux
évolutions de leurs métiers
. Fort de ce constat nous avons mis le paquet
sur le sujet !

Nous avons
mis en place un référentiel de compétences, créé un certificat de qualification
professionnelle (CQP) propre à la branche pour les consultants portés, leur
permettant de faire reconnaître des compétences et savoir-faire nécessaires à
l’exercice du métier de consultant. Cette CQP est d’ailleurs inscrite au
registre spécifique et au répertoire national des certifications
professionnelles (RNCP), ce qui rend ce CQP éligible au compte personnel de
formation.

Nous avons
également négocié la mise en place d’un Contrat professionnel expérimental,
une première ! Il est désormais possible de conclure un contrat de
professionnalisation avec une entreprise de portage salarial, sur la période
allant du 1er janvier 2021 au 1er janvier 2024, qui a pour finalité d’obtenir une
CQP de « Consultant Autonome ».

L’objectif
de ce contrat est de permettre à son bénéficiaire d’acquérir une qualification
professionnelle reconnue assurant son insertion ou sa réinsertion durable dans
le monde professionnel.

Nous pouvons
tous être fiers de tout ce travail accompli avec les organisations syndicales et
patronales !

 

Les
résultats de la représentativité des OS sont tombés, la FEPS a rejoint la table
des négociations : Est-ce que cela va changer quelque chose concrètement ?

Cela ne va
rien changer pour nous. Il faut embarquer tout le monde, nous avons une
habitude en portage salarial de maintenir l’unité : c’est la vraie
manière de faire
 !

C’est ma
nature,
je n’aime
pas le conflit, je pense qu’à plusieurs on va plus loin ! A plusieurs,
on construit l’avenir !

Par rapport
aux résultats des OS, je n’ai pas été vraiment surpris, historiquement, la population
cadres en portage était, et reste encore, majoritaire. Rien d’étonnant dès lors
que la CFE-CGC qui est le syndicat catégoriel qui représente les agents de
maîtrises et les cadres soit premier. C’était intéressant d’ailleurs leur
initiative en 2018 d’avoir créé un syndicat dédié aux salariés portés, le
syndicat Partage. Les résultats
tendent à démontrer que c’était une bonne stratégie.

Même si
d’autres organisations n’ont pas eu de bons résultats chiffrés, je reste convaincu
que tout le monde doit être autour de la table. FO a toujours été très moteur
dans la branche et force de propositions, son score ne reflète pas l’engagement
de l’organisation dans la sécurisation et le développement du secteur.

On va donc continuer
à impliquer le plus de monde possible !

C’est grâce
au dialogue social que l’on existe, il faut en avoir conscience. Beaucoup de
gens l’oublient et ont l’impression de changer les choses à grand renfort de communication
mensongère
mais c’est dans l’échange et la construction que le monde
évolue, pas dans le conflit et le dénigrement. Si tu ne discutes pas avec les
gens, il ne se passera rien !

Tu
déclarais au Guide fin d’année dernière que tu souhaitais « renforcer et
étendre l’unité de la profession ! », que nous devions « être plus
que jamais unis, et soudés, afin de relever ensemble les défis qui nous
attendent dans les prochaines années ». Tu as eu le temps de commencer à
mener ce défi à bien, notamment avec la FEPS ?

La vraie
question à se poser à chaque fois est : y a-t-il tant de choses qui nous
séparent ?

On a tous
vécu la Covid, nos business ont été frappés de plein fouet, les combats menés
auprès de nos adhérents et consultants portés respectifs étaient finalement les
mêmes.

Maintenant que
la FEPS est à la table des négociations, on le voit bien, nous avons de
nombreux points communs et tous vont dans le sens de l’amélioration de la
profession et de la sécurisation des consultants portés !

 

Il y aura peut-être
des divergences, mais c’est ça le dialogue social, on échange, on se confronte,
et on construit ensemble ! En tous les cas je serai toujours disposé à
échanger avec toute personne qui souhaite aller de l’avant pour nous permettre
des plus forts collectivement.