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Travail « en perruque » et portage salarial

06/02/2023

Travail en « perruque » : l’expression ne vous dit rien. Pas de panique, vous n’avez pas raté la dernière expression à la mode (#quietquitting, #greatresignation …).

D’où vient cette expression ? Elle renvoie à une ancienne pratique des coiffeurs qui utilisaient les cheveux coupés des clients de leur patron, pendant leur temps de pause, pour confectionner des perruques pour leur propre compte. Elle qualifie une situation où un salarié utilise, pour son propre compte, les moyens (matériel, temps) de son employeur.

Bien que semblant veillotte de prime abord, l’expression est applicable à des situations tout à fait modernes. L’exemple le plus fréquent est celui d’un salarié, ayant une activité de freelance en parallèle de son emploi, répondant aux demandes de ses clients personnels sur son temps de travail avec les moyens matériels de son employeur.

Nous allons nous intéresser aux risques pour le freelance qui est dans cette situation et plus étonnant aux avantages que peut en tirer un employeur. Quel rapport entre le portage salarial et cette pratique ? On vous laisse le découvrir en fin d’article.

Le travail « en perruque » est-il autorisé ?

Un premier point est important à vérifier avant de développer un side project : avez-vous signé une clause d’exclusivité ? Cette clause a pour objet de limiter la liberté de travail du salarié (restreindre la possibilité pour le travailleur de réaliser une activité, salariée ou non, auprès d’un concurrent ou dans un secteur proche de celui de l’employeur) pendant l’exécution de son contrat de travail.

Attention : la clause d’exclusivité est souvent confondue avec celle de non-concurrence dont l’objet est proche mais cette seconde clause est mise en œuvre après la rupture du contrat de travail.

Si vous réalisez votre activité de freelance « en perruque » il faudra être vigilant : dans le cas d’une activité proche de votre employeur, même si vous ne démarchez pas les clients de votre entreprise, vous pourrez être accusé, à juste titre, de ne pas respecter la clause d’exclusivité insérée dans votre contrat de travail. L’employeur pourra alors obtenir le versement de dommages-intérêts.

Vous avez vérifié et il n’y a aucune clause d’exclusivité dans votre contrat de travail ? Vous n’êtes pas totalement libre pour autant. Un salarié qui développe un side project en freelance doit se rappeler que son activité principale est son activité salariée. Il est donc lié par un contrat à son employeur et doit respecter une obligation de loyauté. Cela signifie que vous avez l’obligation de ne pas nuire à la bonne exécution de votre contrat de travail ou de causer du tort de quelque manière que ce soit à votre employeur.

Or, le principe de travail « en perruque », est contraire à cette obligation. L’utilisation de votre temps de travail pour des projets liés à votre activité de freelance engendre un préjudice à votre employeur qui pourra alors obtenir de vous que vous lui versiez des dommages-intérêts.

Quel intérêt pour l’employeur ?

La question peut sembler saugrenue. Elle ne l’est pas tant que ça. Il ne s’agit pas de jouer ici les naïfs. Bien évidemment, un salarié qui développe des projets pour son activité de freelance au lieu d’avancer sur les dossiers que son employeur lui a confiés lui cause un (voire des) préjudice(s), qu’il utilise ou non les moyens matériels fournis d’ailleurs. Mais avant de licencier un employé ou de tenter d’obtenir des dommages-intérêts pour réparer ce préjudice, arrêtons-nous quelques instants sur les bénéfices qu’une entreprise pourrait tirer de cette situation.

Tout d’abord, les difficultés actuelles de recrutement touchent tous les secteurs d’activité. Ainsi, laisser la liberté à ses salariés de développer une activité de freelance peut permettre d’attirer des talents ou de les retenir. C’est le constat fait par plusieurs entreprises ayant laissé du temps à leurs salariés pour développer une activité en freelance.

Mais ce ne sont pas les seuls arguments positifs à retirer de ces expériences : les employeurs ont constaté que cela permettait au salarié exerçant une activité en freelance, de mieux prendre en compte les enjeux auxquels est soumis l’employeur (étant lui-même dans la peau de l’employeur vis-à-vis de son client).

Enfin, un dernier argument et non des moindres, un salarié qui développe une activité de freelance en parallèle de son activité salariée peut être un salarié plus motivé. En effet, il se développe personnellement, se dépasse et retrouve de la motivation au travail en poursuivant des objectifs plus personnels. Nous pouvons même aller plus loin : sortir des carcans de l’entreprise peut lui donner un second souffle et retrouver de la créativité.

Ces arguments très intéressants permettent de réfléchir à une cohabitation légale et officielle du travail salarié et indépendant. Cette pratique positive et nouvelle de la part des entreprises permettrait alors de sortir du travail « en perruque » et ainsi éviter les risques précédemment énumérés.

Pourquoi le portage salarial peut-être une solution ?

Mais alors, pourquoi parler du portage salarial dans un article sur le développement d’un side project « en perruque » ? De nombreux freelances développent leur activité en parallèle d’une activité salariée par peur de se lancer dans le grand bain de l’entrepreneuriat.

Vous êtes dans ce cas ? Alors, le portage salarial peut permettre de combler ce besoin de protection : un salarié porté est assimilé à un salarié classique en termes de protection sociale et a les mêmes droits, notamment en matière d’assurance chômage.

En effet, le portage salarial est encadré par le Code du travail aux articles L. 1254-1 et suivants du Code du travail. Le salarié porté est hébergé par une entreprise de portage salarial avec qui il signe un contrat de travail. L’entreprise de portage salarial est également liée au client par un contrat commercial prévoyant les conditions de réalisations de la mission du salarié porté, le coût, etc. Au cours de sa mission (si celle-ci dure plusieurs mois) ou bien à la fin de la mission (si celle-ci dure moins d’un mois), le salarié porté obtient un bulletin de salaire attestant de ses cotisations chômage, maladie, maternité, vieillesse, etc. Par ailleurs, l’entreprise de portage lui remet tous les documents de fin de contrat lui permettant alors de s’inscrire (ou de se réinscrire) auprès de Pôle emploi.

[1]Le Monde dimanche,16 nov. 1980, p.i, col. 2, in https://www.cnrtl.fr/definition/perruque#:~:text=Travail%20que%20l’ouvrier%20fait,Faire%20de%20la%20perruque. Consulté le 08.12.2022.

[2] https://www.amedee.co/ces-boites-qui-laissent-leurs-salaries-bosser-en-freelance/

[3] https://www.welcometothejungle.com/fr/articles/travail-perruque